J’ai envie de tout brûler
De défaire ton visage.
Leurs visages.
Tous ces hommes qui ont détruit des années de nos vies.
Volé notre amour, notre plaisir
Mais plus que ça
Notre envie de vivre
Tous ces hommes qui nous traitent comme
Un vide ordure
Toi, toi qui t’es agrippé à ma taille
Toi, toi qui m’a fait sortir de mon corps
Toi, toi qui a pris une fille de 15 ans
Toi, toi qui t’es enfui dans la foule
Parce que j’ai crié et je ne t’ai pas brisé en morceaux
Comme tu m’as brisé moi
Mais aussi toi
Toi, toi qui m’a suivie jusque chez moi
Toi, toi qui m’a aussi suivie
Toi, toi qui m’a traqué
Toi, toi qui ne voulait pas partir de mon lit
Mais encore toi
Toi, toi qui m’a regardé comme une pute
Toi, toi qui m’a regardé comme une moins que rien
Toi et vous en qui j’avais confiance
Mais aussi lui
Lui, lui qui a bousillé ma famille
Mais aussi eux
Eux, eux qui ont violé mes amies
Comment arrivez-vous à vivre avec vous-mêmes?
Plus que de l’indécence, c’est une violence inouïe que vous tentez de protéger
Que vous refusez d’entendre quand vous sentez les femmes vous filer entre les doigts
Que vous invisibilisez quand vous nous implorez de vous faire confiance
Mais chaque fois qu’on baisse notre garde,
Chaque fois qu’on oublie que la rue, l’école, le travail, votre appartement est un no man’s land
Chaque fois, vous nous abattez.
Tel un vulgaire trophée de chasse, vous nous descendez.
Votre présence devient de plus en plus insupportable.
On se tue à vous défendre, à croire en vous, à ne pas vous mettre de côté.
à dire, pas tous. Pas lui. Pas toi.
Et si en fait, toi aussi?
Tu nous protèges? Tu nous défends? Tu nous respectes? TU NOUS CROIS?
Quand bien même tu laisserais les criminels sur le banc,
Tu ne comprendrais pas.
Tu ne comprendrais pas notre rage et notre besoin de défoncer les murs et hurler, “au voleur.”
“Au voleur, il m’a tout pris.”
Tu ne comprendrais pas notre immense solitude et désespoir quand on revit ce moment pour la centième fois dans notre corps et notre tête.
Tu ne comprendrais pas notre envie de mourir quand on se souvient si bien de tout ce qu’il nous a fait mais qu’on n’obtient aucune justice.
Tu ne comprendrais pas la peur dans notre ventre quand on franchit n’importe quelle porte.
A l’intérieur, à l’extérieur. Vous rodez.
Tu ne comprendrais pas.
Et alors que je réalise l’emprise que lui et tous les autres ont, l’ampleur du pouvoir qu’ils ont de nous bouffer de l’intérieur, je ne sais pas si j’ai la force de te donner le bénéfice du doute.
Je ne sais pas si j’ai la force de dire à mes sœurs, “ne vous inquiétez pas.”
Mon cœur bat trop fort d’angoisse pour ça.
Ce texte est pour la jeune fille sur un pont londonien le 1er janvier 2016 qui a retrouvé la parole. Ce texte est pour extérioriser la haine qui me ronge quand je sens son horrible corps contre le mien. Ce texte est pour que la honte change de camp. Ce texte est pour que mes yeux retrouvent toute leur lueur. Ce texte est pour nous.
Un texte très puissant et extrêmement touchant !
Merci beaucoup, ça me touche vraiment!